L’article propose l’analyse d’un texte que le memorialiste Pedro Rioux de Maillou consacre a la fin du xixe siecle a une lecture de Hernani par Victor Hugo en 1830 : dans ce « souvenir d’un autre », le polygraphe choisit de combler une lacune dans les temoignages de la « generation de 1830 », laquelle passe souvent sous silence les descriptions de ces moments cenaculaires pourtant passes a l’etat de mythologies. Mais si elle a tout d’une creation complete, la scene nous renseigne doublement sur les « resistances de l’oralite » qui marquent, d’un bout a l’autre, le xixe siecle : d’abord parce que son luxe de details revele par contraste le caractere fragmentaire des informations de premiere main dont l’on dispose pour fixer l’aura de ces lectures romantiques ; ensuite parce qu’elle permet de mieux apprehender le processus de sacralisation dont la parole romantique est a posteriori l’objet.