L'arthrose digitale (AD) est souvent considérée comme une maladie moins invalidante que la polyarthrite rhumatoïde (PR). Cependant, l'arrivée des thérapies ciblées a permis de changer considérablement le pronostic des patients atteints de PR, contrairement à l'arthrose digitale, et notamment à sa forme érosive, pour laquelle les options thérapeutiques sont très limitées. L'objectif est de comparer le retentissement au long cours de l'AD érosive (ADE) à celui de la PR en comparant : (1) la douleur et le retentissement fonctionnel ; (2) la prévalence des comorbidités et celle des maladies cardiovasculaires (MCV). Nous avons sélectionné les patients atteints d'ADE, définie comme au moins une articulation érosive selon le score de Verbruggen parmi les patients de la visite d'inclusion de la cohorte DIGital Cohort Osteoarthritis Design (DIGICOD) [1] et les patients atteints de PR, selon les critères ACR/EULAR 2010, de la visite à 10 ans de la cohorte ESPOIR (Étude et Suivi des Polyarthrites Indifférenciées Récentes) [2]. Nous avons comparé entre ces deux populations : la douleur au repos et à la mobilisation (échelle visuelle analogique (EVA) 0–100 mm ≥ 40/100), la fatigue (EVA ≥ 25/100), le retentissement fonctionnel (score normalisé (0–100) ≥ 16.7 du Health Assessment Questionnaire pour la PR, et de l'AUStralian CANadian Osteoarthritis Hand Index pour l'ADE) ; le risque d'avoir ≥ 2 comorbidités (parmi MCV, cancer, hémopathie, fracture) ou au ≥ 1 MCV (parmi hypertension artérielle, diabète, dyslipidémie, infarctus du myocarde, infarctus cérébral). Un modèle de régression logistique a été utilisé et ajusté sur plusieurs facteurs confondants. Nous avons sélectionné 138 patients atteints d'ADE et 379 de PR. La médiane [interquartile] d'âge était de 67,3 [64,3–72,2] ans pour les ADE versus 48,6 [39 ;55,6] pour les PR. La durée d'évolution de la maladie était de 13,5 ans [7,0 ; 20,0] pour l'ADE et 10,5 ans [10,3–10,7] pour les PR. Les anticorps anti-CCP étaient positifs chez 65 % des PR. Parmi les PR, 61 % étaient en rémission, 82 % recevaient du méthotrexate, 37 % une biothérapie et 25 % des corticoïdes. Vingt pour cent des ADE recevaient des anti-inflammatoires non stéroïdiens. Le nombre d'articulations douloureuses des mains était plus important chez les patients atteints d'ADE que de PR (4,0 [2 ;8,8] vs 0,0 [0,0 ; 3,0], p < 0,001). Dans l'analyse multivariée, l'ADE était associée à plus de douleur à la mobilisation (OR = 3,13 IC 95 % [1,74–5,68] p < 0,001) et plus d'incapacité fonctionnelle. Il n'y avait pas de différence pour la douleur au repos et la fatigue (OR = 2,27 IC 95 % [1,26–4,17], p = 0,007). Enfin, la proportion de patients ayant au moins 2 comorbidités était plus importante chez les patients ADE que PR (37,7 % vs 27,5 %). Néanmoins, dans l'analyse ajustée notamment sur l'âge, le risque d'avoir 2 comorbidités était moins important dans l'ADE que dans la PR (OR = 0,25 IC 95 % [0,13–0,48] ; p < 0,001). Il n'y avait pas de différence pour le risque cardiovasculaire. Après 10 ans d'évolution, l'ADE est associée à plus de douleur et d'incapacité fonctionnelle mais à moins de comorbidités que la PR. Cette étude souligne la nécessité de nouveaux traitements efficaces dans l'ADE. [ABSTRACT FROM AUTHOR]